Grandes figures des services spéciaux français : Jacques Dupas (article mis à jour)

            Jacques Jean Dupas (1915-1963) a joué un rôle important dans l’histoire des services spéciaux français. Fondateur du centre d’instruction nautique de Collioure (1948), il a été l’un des créateurs de l’école des nageurs de combat de Saint-Mandrier-sur-Mer (1952). Homme discret, il n’en a pas moins marqué tous ceux qui ont pu croiser sa route en raison de son abnégation, de son courage, de ses qualités de pédagogue et pour la noblesse de son caractère. La France lui doit de pouvoir disposer d’une des meilleures formations de nageurs de combat au monde. Si son action n’a jamais été oubliée parmi ses héritiers, que ce soit à Collioure, Aspretto, Toulon ou Quelern, elle n’a pas encore fait l’objet d’une étude approfondie, ce qui est fort regrettable. En attendant qu’une telle entreprise puisse voir le jour, on nous permettra donc de présenter ici quelques éléments biographiques glanés ici où là parmi les rares archives et témoignages disponibles.

Nota : cet article a été mis en ligne pour la première fois en juillet 2021. Depuis lors, la consultation de nouvelles archives, et notamment celle du dossier de Jacques Dupas conservé au SHD, nous a permis d’accroître considérablement le nombre de données dont nous disposions. La version qui suit a été remaniée en août 2022 afin d’intégrer ces nouvelles informations. Elle doit donc être considérée comme un document largement inédit.

. Le milieu d’origine

Jacques Jean Dupas est né le 22 août 1915 dans le quartier du Canet, à Marseille. Il a grandi au sein d’une famille très cosmopolite.

Son père, également nommé Jacques Jean Dupas, a en effet vu le jour à New York en 1891. Il était le fils de Jacques (« James ») Alexandre Dupas (1857-1926), qui travaillait alors au sein de la représentation diplomatique française aux États-Unis. L’épouse de ce dernier et donc la grand-mère paternelle de Jacques, Helmina Villeré (1858-1945), était issue d’une vieille famille franco-américaine originaire de La Nouvelle-Orléans.

Par la suite, Jacques Alexandre Dupas deviendra vice-consul de France à Galveston, au Texas (1897), puis gérant du consulat de La Havane (1899) et enfin (à compter de 1907) consul de France à Sao Paulo au Brésil. La mère de Jacques Dupas, Anna Louise Albertine Brusone, était née à Marseille le 17 octobre 1884. C’était la fille d’un coiffeur dont l’origine italienne ne sera sans doute pas pour rien dans la physionomie très méditerranéenne dont héritera son fils.

Ses parents n’étaient pas encore mariés à la naissance de Jacques et il fallut attendre le 21 mars 1921, date de leur union célébrée à la mairie du 8e arrondissement de Paris, pour que le jeune garçon, alors âgé de cinq ans, soit officiellement légitimé.

Doté du goût de l’aventure caractéristique de sa lignée, Jacques Dupas Père avait participé à une expédition militaire organisée par les États-Unis contre le Honduras en 1911. Blessé par balle, il avait du être amputé du bras droit. De ce fait, il n’aura pas à effectuer de service militaire après son retour en France ni à combattre lors de la Première Guerre mondiale (ainsi que l’atteste son registre matricule). Devenu négociant et armateur, il va s’installer à Paris et plus précisément au n° 11 de la rue de La Boétie, tout près de la gare Saint-Lazare. Par la suite, la famille Dupas partira s’installer à Alger (au 49 Chemin Pouyanne, dans le quartier du Telemly), où le père décidera de se lancer dans une carrière d’hôtelier. Devenu veuf en 1935, Jacques Dupas Père se remariera trois ans plus tard avec une certaine Carmen Louise Hancart (1902-1994) et ne tardera pas à dilapider sa fortune.

Il semble que ce passif familial pour le moins mouvementé a valu à Jacques Dupas fils de pouvoir faire trois fois le tour du monde pendant sa jeunesse et de vivre dans plusieurs pays différents, au Brésil d’abord (chez son grand-père paternel sans doute) puis en Afrique du Nord (et même peut-être au Moyen-Orient ?). De ce fait, le jeune homme eut tout le loisir de travailler son don naturel pour les langues, à tel point qu’il finira par en parler trois ou quatre avec une certaine aisance. Alors qu’il faisait ses études secondaires dans un lycée d’Alger, il manifestera également des talents sportifs ce qui lui permettra de s’illustrer dans plusieurs compétitions d’athlétisme.  

. Un Saharien au combat

Très marqué par le décès de sa mère et s’entendant par ailleurs assez mal avec son père, Jacques Dupas va échouer à obtenir son baccalauréat. Décidé à sortir de cette mauvaise passe, il choisit de s’engager dans l’armée pour trois ans en juillet 1937 (matricule 8231). Affecté dans une compagnie de l’air, il sera formé en tant que métrologiste sur la base d’hydravions d’Alger (1937-1938). Il en profitera pour acquérir au passage de bonnes connaissances en météorologie, ce qui lui sera plus tard bien utile.

En février 1938, il est mis en mouvement vers le poste militaire d’Aoulef, situé au coeur du Sahara, à mi chemin entre In Salah et Reggane. Par la suite, en mars 1940, il sera déplacé vers le poste d’Ouallen où il va rester jusqu’en juin 1940.

Pendant près de deux ans, le soldat de deuxième classe Dupas va donc s’occuper d’établir quotidiennement des relevés d’hygrométrie et de température, mesurer la vitesse du vent et organiser le lâcher de ballons sondes. N’étant ravitaillés qu’une fois toutes les quatre semaines, Dupas et son opérateur radio vont devoir vivre dans des conditions particulièrement éprouvantes, en particulier à Ouallen. Mais si son collègue finira par faire une sérieuse dépression, tel ne sera pas son cas. Car Dupas va apprendre à aimer par dessus tout tout le silence de ces espaces infinis et la noblesse de caractère de ceux qui l’arpentent. Il croisera ainsi la route de l’explorateur Théodore Monod dont la sagesse l’inspirera beaucoup.

C’est depuis le Sahara que Dupas va apprendre la grave défaite subie par la France et les conditions de sa capitulation face à l’armée allemande. Pendant quelque temps il va stationner dans l’Algérois, et notamment à Blida, où il va aider à récupérer le matériel et les troupes que l’armée de l’air a entrepris de rapatrier de Métropole pour les mettre à l’abri.

En janvier 1941, il est. déjà de retour dans le grand désert, cette fois-ci au sein de la Compagnie saharienne du Tidikelt. Cette unité, dont le quartier général se trouve à In Salah, est alors dirigée par le célèbre Maurice Duprez (1881-1943), qui s’est fait remarquer au cours des décennies précédentes pour ses remarquables qualités d’explorateur et qui commande, depuis avril 1940, le territoire militaire des oasis.

Fondées en 1902 à l’initiative du fameux général Georges Laperrine (1860-1920), les compagnies sahariennes ont pour mission d’assurer la surveillance des vastes territoires contrôlés par la France aux confins de l’Algérie, de la Mauritanie, du Soudan français et du Niger.

Si les tribus locales, qu’elles soient touarègues ou arabes, sont pacifiées depuis longtemps, le danger vient plutôt des Italiens, qui contrôlent alors la Libye voisine et pourraient être tentés de mener des incursions dans le Sud-algérien. Se déplaçant à dos de dromadaires, les méharistes sont accompagnés de supplétifs locaux, les goumiers, qui composent le gros de leurs troupes. Depuis leurs postes, ils partent régulièrement effectuer des inspections le long des pistes caravanières, discutant avec les habitants et réglant leurs problèmes quand ils le peuvent. Dupas va parfaitement répondre aux attentes de ses chefs. Promu au grade brigadier (mai 1941 puis de brigadier-chef (juillet 1942), il deviendra maréchal des logis en janvier 1943.

La situation des militaires français basés en Afrique-du-Nord va basculer en novembre 1942, au moment où les Alliés vont débarquer des troupes à Alger, Oran et Casablanca. Alors que l’autorité du régime de Vichy s’effondre avec fracas, le pouvoir va d’abord passer entre les mains de l’amiral Darlan puis dans celles de son successeur, le général Henri Giraud, qui va entreprendre de mettre l’armée française d’Afrique au service de l’effort de guerre allié.

Les compagnies méharistes se retrouvent naturellement sollicitées. En décembre 1942 et janvier 1943, elles vont ainsi participer à l’occupation des oasis du Fezzan, qu’elles parviendront à arracher de vive force aux troupes italiennes. Dans la foulée, elles vont également prendre part à la campagne de Tunisie menée contre l’Afrikakorps. Il ne semble pas que Jacques Dupas ait participé à ces opérations si ce n’est pour leur apporter du soutien logistique.

Survenue en mai 1943, la prise du Cap-Bon va marquer la fin de la reconquête de l’Afrique du Nord sur les forces de l’Axe. Le 1er août suivant, l’armée d’Afrique et les formations gaullistes (FFL) fusionnent pour constituer l’armée française de libération. La reconquête de la Métropole devient alors le nouvel objectif. On recrute des troupes à tour de bras et partout il n’est plus question que de constituer de nouvelles unités.

Jusque-là Dupas avait eu l’espoir de faire carrière chez les Méharistes (en mai 1943 il avait suivi le cours préparatoire au brevet de chef de section méhariste à Ouargla). Mais c’est alors qu’il va changer d’avis.

Le 8 avril 1944, il quitte ainsi la compagnie saharienne du Tidikelt (devenue Tidikelt-Hoggar en décembre 1943) afin de pouvoir rejoindre le bataillon de choc. Cette formation, dont le commandement a été confié au lieutenant-colonel Fernand Gambiez (1903-1989), doit permettre à la France de disposer de soldats capables de mener des actions de guerre derrière les lignes allemandes. La sélection est donc draconienne et l’entraînement plus encore. On retrouve un peu de tout dans cette unité d’élite ; des Légionnaires, des anciens de l’armée d’Afrique, des FFL ou bien encore des civils ayant fui la Métropole. Ils n’ont que deux points communs, leur jeunesse et leur zèle.

Durant près de cinq mois, entre avril et octobre 1944, Dupas va être formé à la guerre subversive (sabotage, sécurité, etc.) par des instructeurs issus de l’OSS américaine ou du SOE, les services spéciaux britanniques. Il accomplira ainsi un stage de saut en parachute au Club des Pins, un stage de sabotage au camp 23 de l’OSS et un stage tactique commando à Sidi-Ferruch.

Le 6 juin 1944, il est intégré au 2e commando du 1er groupe des Commandos de France. Neuf jours plus tard il sera nommé au grade de maréchal des logis. Embarqué à Alger le 9 octobre 1944 à bord du « Montcalm » à destination de la France, il arrivera à Toulon le 10 octobre 1944. S’il n’a donc pas pu participer à la première vague d’assaut, Dupas saura se rattraper.

Il ne nous appartient pas de décrire dans le détail ce qu’a été l’épopée du bataillon de choc. Raymond Muelle, qui a participé à cette aventure, l’a suffisamment bien raconté dans ses ouvrages[1]. Qu’il nous suffise de rappeler que le premier engagement de cette unité a eu lieu entre le 13 septembre et le 4 octobre 1943, lorsqu’elle a brillamment participé à la reconquête de la Corse. Après avoir mené quelques opérations commandos sur les côtes italiennes, ses hommes seront envoyés sur l’île d’Elbe, où ils vont contribuer à chasser les Allemands à l’issue de l’opération « Brassard » (juin 1944).

Débarqué près de Saint-Tropez le 20 août 1944, le bataillon va devenir l’un des fers de lance de la 1ère armée du général De Lattre. Il affrontera avec succès la Wehrmacht à Toulon (21-26 août), Dijon (11-12 septembre), en Haute-Saône (Ronchamp, Servance), dans les Vosges (3 novembre), à Belfort (17-23 novembre) et en Alsace (Hundruck, Jebsheim, Durrenentzen). Ayant franchi le Rhin à Germersheim au début du mois d’avril 1945, il poursuivra son action dans le Sud de l’Allemagne (Karlsruhe, Pforzheim, Reutlingen) jusqu’à ce que la capitulation ne le surprenne alors qu’il franchissait le col de l’Arlberg, porte d’entrée du Tyrol autrichien.

Dans les faits, le bataillon fut rarement été utilisé pour mener des opérations spéciales derrière les lignes ennemies mais plutôt comme une unité d’assaut classique, avançant par des séries de coups de main en profitant du soutien des blindés et de l’aviation[2]. Ses hommes n’en feront pas moins preuve d’un remarquable esprit offensif, ce qui leur vaudra d’ailleurs d’endurer de lourdes pertes ; près de 250 tués ou disparus et plus de 530 blessés sur un effectif initial de 700 hommes !

Concernant l’action de Jacques Dupas, il nous suffit de rappeler qu’il a participé à de nombreux affrontements au sein du 1er Choc et qu’il s’est à chaque fois illustré par son courage et son engagement sans faille. Le 6 novembre 1944, il est ainsi blessé à la cuisse lors d’un combat particulièrement accroché à Haut-le-Tôt, près de Gerardmer, dans les Vosges. Le 4 avril, il participe à la prise de Karlsruhe puis le 8 avril, à la bataille de Pforzheim où sa bravoure lui vaudra d’obtenir une citation élogieuse[3]. Il combattra ensuite à Pflullingen (22 avril), à Langenbrand, à Bregenz (1er mai) avant de participer à l’occupation de la vallée de l’Arlberg les 6 et 7 mai 1945

Ayant pu faire valoir ses qualités, Dupas va obtenir de pouvoir rester dans l’armée d’active au lendemain de la victoire. Mieux même, en juillet 1945 et bien qu’il soit déjà âgé de trente ans, il sera admis à l’école militaire inter-armée (EMIA) de Saint-Cyr-Coëtquidan, dont il ressortira diplômé en tant que sous-lieutenant le 26 décembre 1945 [4].

Envoyé accomplir un stage d’application à Auvours entre décembre 1945 et mars 1946, Dupas va ensuite traverser l’une de ces pénibles phases de lassitude et découragement qui l’avait déjà frappé en 1937 et qu’il rencontrera de nouveau par la suite. Affecté au Dépôt central des Isolés (DCI) de Paris, il s’interroge sur son avenir et songe même à démissionner. Ses chefs finiront cependant par lui faire changer d’avis.

Le 18 septembre 1946, il est dirigé vers l’école des troupes aéroportées (ETAP) de Pau où il va décrocher son brevet de parachutiste (n°7142) le 14 octobre 1946 (il accomplira par la suite 131 sauts jusqu’au 30 juin 1955).

Le 14 septembre, il avait été autorisé à se rendre en région parisienne afin d’épouser, à la mairie de Courbevoie, madame Paule Cadol, une niçoise au tempérament particulièrement énergique qui deviendra sa première épouse[5].

. Le 11e Choc à Mont-Louis puis Collioure

La carrière de Dupas, jusque-là somme toute assez classique, va connaître un véritable tournant à la mi-octobre 1946, lorsqu’il est recruté par le commandant Morlanne, le chef du Service Action du SDECE. Cet officier est alors en train de mettre en place une nouvelle unité, le 11ème bataillon parachutiste de choc, qui doit servir de bras armé aux services spéciaux français. Au vu du profil de Dupas, il a estimé que ce dernier pourrait devenir un excellent élément et l’avenir se chargera de lui donner raison[6].

Et alors qu’il pensait être envoyé en Indochine comme la plupart de ses camarades, Dupas va rejoindre la forteresse de Montlouis, située dans les Pyrénées-Orientales, où il sera placé sous les ordres de quatre chefs de corps successifs, à savoir Edgard Mautaint (1946-1947), Roger Rivière (1947), Paul Aussaresses (1947-1948) et enfin Yves Godard (1948-1952). A Montlouis, le lieutenant Dupas va aussi pouvoir côtoyer de près les autres pionniers du fameux 11ème Choc, qu’il s’agisse de Robert Maloubier, Marcel Chaumien, René Bichelot et Réné Obadia ou encore André Varnier, Claude Reilhac et André Pralon.

Dupas va parfaitement réussir son intégration au sein de cette équipe. Très énergique et plein d’allant, il impressionne ses camarades par ses capacités physiques hors du commun. Excellant en tout, il est aussi bon en course à pied qu’en parcours d’obstacles ou en ski (il obtiendra ainsi son brevet de skieur militaire au centre de ski de Barèges dans les Hautes-Pyrénées). Dès le mois d’octobre 1946, on décide d’ailleurs de lui le nommer officier des sports et de lui confier l’entraînement physique des recrues (en juin 1947 il deviendra officiellement chef de peloton instruction sport et combat de choc).

Il démontre aussi des talents d’artiste et notamment de dessinateur. A la demande de Morlanne et Aussaresses, c’est d’ailleurs lui qui va élaborer l’emblème officiel du bataillon, la fameuse panthère, Bagheera, dont le profil effilé sera homologué en octobre 1947.

Une nouvelle étape, peut-être la plus importante de la carrière de Jacques Dupas, se produit en juin 1948, lorsque Yves Godard choisit de lui confier la mise en place du Centre d’Instruction Nautique (CIN) qu’il compte implanter au sein du fort Miradou de Collioure. L’objectif consiste à apprendre aux recrues du 11e Choc à maîtriser l’élément aquatique afin de pouvoir étendre ainsi le champ de mission des services spéciaux français. Excellent nageur, bon instructeur et par ailleurs officier toujours très discipliné, Dupas a su gagner la confiance de Godard, qui a donc décidé de lui confier cette difficile tâche.

Dupas et les deux assistants qu’on lui a fournis, le sergent (Joseph ?) Cuvelier (antillais) et le caporal (Francis ?) Varney (tahitien), vont tout de suite se mettre à l’ouvrage. Leur dotation de départ est plutôt chiche : trois ou quatre barques de contre-plaqué de fabrication américaine, cinq ou six canots britanniques en toile pliable[7]. Ils n’ont à leur disposition aucune combinaison et pas de bouteilles à air comprimé mais seulement quelques masques, lunettes, palmes et tubas, tous achetés dans le commerce.

Substituant l’énergie aux moyens, Dupas et ses adjoints vont se démener afin de pouvoir mettre en place un centre d’instruction qui soit digne de ce nom. Lorsque tout est prêt, ils commencent à accueillir leurs premiers stagiaires. Par roulement, les recrues du 11e Choc viendront désormais passer deux mois à Collioure. A leur intention, Dupas va élaborer un programme particulièrement corsé. A raison de 10 heures d’exercices par jour, les stagiaires vont devoir se dépasser comme jamais afin d’être capables de nager en pleine mer pendant des kilomètres (y compris avec armes et treillis), de plonger en apnée jusqu’à dix mètres de profondeur, mais aussi de pouvoir naviguer avec une petite embarcation par tous les temps et y compris de nuit, de mener l’abordage d’un bateau adverse ou bien encore de récupérer des nageurs à bord de canots lancés en pleine vitesse.

Le stage se conclura invariablement par un saut en parachute conduit au large de Collioure ou de Narbonne. Montés à bord de vieux Ju-52, les hommes seront largués par groupe de quinze à environ 300 mètres d’altitude. A cette occasion, Dupas va devenir l’un des inventeurs de cette technique consistant pour le parachutiste à se dégrafer lorsqu’il est parvenu à deux ou trois mètres au-dessus de la surface et ceci afin d’avoir le temps de s’éloigner pour éviter que sa voilure ne lui retombe dessus et ne l’empêche de remonter à l’air libre. Le premier essai de ce type sera conduit au large de Nice le 22 juin 1947.

Au début, les hommes vont effectuer cette manœuvre périlleuse avec leur tenue de saut puis, en s’enhardissant progressivement, ils commenceront à le faire avec palmes et tubas et finalement en tenue de plongée complète de façon à être directement opérationnels. La réussite des stagiaires à toutes ces épreuves leur vaudra l’obtention d’un Brevet d’Instruction Nautique (BIN). Loin de s’arrêter en si bon chemin, Dupas va aussi expérimenter le saut sur glacier (avril 1948) et le saut en lac (juin 1949)

En 1951, à la demande de Morlanne et Godard, Dupas et son adjoint, l’adjudant Denamiel, vont s’atteler à monter un « Groupement amphibie » au sein du 11 BPC. L’objectif consiste cette fois-ci à mettre en place une structure capable d’organiser l’infiltration et l’exfiltration d’agents et de matériels par le biais de débarquements clandestins. Pour ce faire, Dupas et ses adjoints vont fortement s’inspirer des méthodes mises au point par les Britanniques pendant la dernière guerre.

Habillés en civil et dotés de faux papiers, les agents en mission doivent d’abord prendre place à bord d’une vedette rapide ou d’un sous-marin. Accomplie tous feux éteints, la traversée est la plus rapide possible. Parvenus à une distance raisonnable de la côte, les hommes entament un dialogue par signaux lumineux avec le comité de réception chargé de les récupérer. Si les mots de passe sont conformes le feu vert est donné. Ils montent alors à bord de canots pneumatiques, pagayant sans faire de bruit et à la seule lumière de la lune afin de gagner la plage ou la crique où ils pourront débarquer avec leur matériel en toute discrétion. Seuls ou bien guidés par leurs camarades ils se faufileront ensuite vers l’intérieur des terres avant de s’installer dans une planque d’où ils pourront enfin débuter leur mission. Afin d’être à même de conduire ces entraînements Dupas avait passer son brevet d’officier de renseignement en mai 1947 et il décrochera celui d’opérateur aérien en octobre 1951.

L’objectif étant de parvenir à réaliser ces opérations en déjouant la surveillance d’éventuels ennemis, tous les exercices seront conduits de façon à ce que les conditions soient les plus réalistes possibles (y compris donc avec l’intervention d’autres agents chargés de jouer les adversaires et d’empêcher les dits débarquements). Pour sanctionner leur réussite à cette formation, les parachutistes du 11e Choc se verront attribuer un Brevet d’Opération Maritime (BOM).

. Une figure d’exception

Les missions qu’il conduit à Collioure n’empêchent pas Dupas de participer pleinement aux activités du bataillon. En janvier 1951, il va donc s’illustrer lors de l’assaut fictif dirigé par Godard contre la base aérienne de Bordeaux-Mérignac, assaut dont l’objectif était de tester la sécurité du site. Parachutés de nuit à proximité de la base, les experts du 11e Choc vont se montrer particulièrement inventifs et audacieux afin d’arriver à leur but. En la matière, Dupas réussira un sacré coup puisqu’il parviendra à faire prisonnier un officier de l’armée de l’air avant de s’emparer de son uniforme et de pénétrer ensuite avec succès dans la base.

Au fil des années et alors que le bataillon où il sert prend peu à peu de l’ampleur, Dupas construit sans le vouloir sa légende. Le teint halé, les épaules solides, la mâchoire carrée, les cheveux noirs de jais et le torse velu, l’homme est tout en muscles[8]. Bienveillant et plein d’humour, c’est aussi un remarquable professionnel et un officier consciencieux, qui se montre attentif à la vie de ses hommes avec lesquels il partage tout.

Ses inclinaisons personnelles le portent volontiers vers un certain mysticisme. Poète à ses heures, c’est aussi, on l’a dit, un excellent dessinateur. Mais l’une des choses qui frappe le plus chez lui est peut-être le souci qu’il apporte à son hygiène de vie. Ne fumant pas et préférant de loin l’eau à l’alcool, il ne mange presque pas de viande et se nourrit ordinairement de dattes, de riz et de salade. De fait, il dénote parmi ses camarades du 11e dont beaucoup sont réputés pour être de sacrés noceurs.

Lorsque lui et ses compagnons sont de sortie dans Collioure, ils partent se détendre à la Coba, une ancienne pêcherie reconvertie en dancing, ou bien au Café des sports, l’établissement tenu par René Pous et son épouse Pauline, deux grands amateurs d’art. Bien que leurs activités soient théoriquement secrètes, Dupas et ses hommes n’en sont pas moins devenus des sortes de vedettes locales. A chaque fois qu’une célébrité est de passage dans le petit port de pêche, elle ne manque d’ailleurs pas de venir rendre visite aux drôles de soldats du Fort Miradou. Dupas verra ainsi passer Michèle Morgan, le producteur Raoul Levy (celui qui révéla Brigitte Bardot) ou encore l’explorateur norvégien Thor Heyerdahl (devenu mondialement célèbre pour avoir traverser le Pacifique Sud à bord d’un radeau de roseaux en 1947).

Pendant ses loisirs, Jacques Dupas pratique assidument la spéléologie. En août 1949, il sera ainsi le premier à pénétrer dans la grotte de la Font-Estramar, située près de Salses. C’est cette activité qui va le conduire à entrer en relation avec l’équipe du commandant Jacques-Yves Cousteau. En août 1951 et avec l’accord de ses supérieurs, Dupas va ainsi organiser plusieurs plongées de reconnaissance à Estramar aux côtés de Cousteau, du géologue Haroun Tazieff (dit «  Garouk »), qui deviendra un proche ami, mais aussi des ingénieurs Frédéric Dumas et André Girardot (l’inventeur de la caméra sous-marine) ou encore avec le cinéaste Jacques Ertaud[9].

En novembre 1951, après avoir été détaché par son ministère, Dupas va même pouvoir s’embarquer depuis Toulon à bord de la Calypso afin d’accomplir un séjour dans les îles Farasān, au sud de la mer Rouge. A la fois plongeur et matelot, il va côtoyer de près le commandant Cousteau (et son épouse Simone), Haroun Tazieff, Dumas et Ertaud, mais aussi le reste de l’équipage, à savoir le capitaine François Saoût, le chef de pont Jean Bertrand, le maître de quart Etienne Puig, le gabier Albert Raud, le cuisinier Fernand Hanen (dit « Blanc »), l’ingénieur Jean de Wouters d’Oplinter, le médecin Jean-Loup Nivelleau de la Brunière, le matelot Tony Besse, l’électricien Paul Martin, les mécaniciens René Montupet et Octave Léandri (dit « Titi »), un maître d’hôtel soudanais, Abdo, ainsi que les huit membres de l’équipe scientifique[10].

Ce voyage accompli sur les traces d’Henry de Monfreid (l’un des héros de Dupas) sera riche en évènements. Il faudra tout d’abord affronter une tempête assez sérieuse en mer Ionienne, passer par le canal de Suez puis naviguer pendant plusieurs semaines près de côtes dont les fonds n’ont pas encore été tous cartographiés. Dupas et les siens vont ensuite effectuer de nombreuses plongées au milieu des requins et recueillir ainsi quantité de nouveaux spécimens de poissons, de crustacés, de coraux et d’éponges. Le périple s’achèvera finalement le 6 février 1952, avec le retour de la Calypso dans la rade de Toulon.

. L’épopée des nageurs de combat « terre »

Mais si Jacques Dupas est resté dans l’histoire des services, c’est sans aucun doute pour le rôle majeur qu’il a joué dans la création des premiers nageurs de combat (NC) français.

Le début de cette aventure remonte à 1950. Cette année-là, en effet, et alors qu’il consultait des plans d’état-major évoquant la préparation de débarquements amphibies, Robert Maloubier a remarqué qu’un rôle essentiel était attribué aux nageurs de combat, qui devaient agir en éclaireurs et faire sauter nuitamment les obstacles installés par l’ennemi sur les côtes et dans les ports. Or, à cette époque, la France ne dispose encore d’aucune unité capable de réaliser ce type d’opérations, ce qui ne manquera pas de rendre son armée dépendante du bon vouloir de ses éventuels alliés. Maloubier fait donc part de ses inquiétudes à Morlanne, qui abonde dans son sens et lui demande de rédiger une note qu’il se chargea de transmettre ensuite à la présidence du Conseil[11].

Après avoir obtenu l’accord de son autorité de tutelle, Morlanne va entrer en contact avec ses collègues de l’Intelligence Service, qui, à leur tour, vont accepter de jouer les bons offices auprès de l’Amirauté. Et c’est ainsi que Robert Maloubier obtiendra de pouvoir se rendre par deux fois à Portsmouth et Plymouth en 1950 et 1951 afin de s’initier à la nage de combat aux côtés des Frogmen de la Royal Navy. Même si ces derniers se garderont bien de lui communiquer tous leurs « trucs », il en apprendra suffisamment au cours des stages qu’il effectuera à leurs côtés pour s’estimer capable d’ouvrir dès son retour un premier centre de formation.

Parti à la recherche d’une base capable d’accueillir ses hommes, Morlanne va obtenir l’accord de la Marine afin de pouvoir les installer au Centre d’instruction des opérations amphibies (CIOA) d’Arzew, où le patron des lieux, le commandant André Patou (1910-2006), acceptera de leur prêter un ancien dépôt de carburant afin qu’y soit implantée une école de nageurs de combat. Nommé directeur des cours en janvier 1952, Maloubier sera vite rejoint par l’enseigne de vaisseau Claude Riffaud (1924-2016), auquel l’état-major de la Marine a confié la même mission. Maçonnerie, terrassement et peinture, les deux hommes vont devoir jouer des coudes avant de pouvoir rendre les lieux habitables.

C’est en mai 1952 que le lieutenant Dupas va arriver à son tour à Arzew en provenance de Collioure. A ses côtés, on va retrouver ceux qui vont devenir les premiers NC français : les seconds-maîtres Julien Le Gouil (n°4, Marine) et Roger Morvan (n°5, Marine) ou encore les sergents François Camard (n°6, 11e Choc), Pierre Pasi (n°7, 11e Choc) et Roger Demoulin (n°8, 11e Choc). Au passage, Dupas va recevoir le brevet numéro 3 tandis que Maloubier et Riffaud seront considérés comme les n°1 ex aequo. 

A partir du 15 juillet 1952, ces quelques pionniers vont assurer l’encadrement du premier cours de NC dont les principales recrues seront Rémy Fouchaux (n°9), André Ménétrier (n°10), André Avry (n°12), Jean Guivarch, Roger Chemery et Roger Dupuy. Tous auront le privilège d’être formés à la manipulation des explosifs au centre d’instruction du SA, à Cercottes, avant de revenir ensuite à Arzew pour la partie plongée proprement dite.

L’unité ayant besoin d’une symbolique appropriée, on va une nouvelle fois faire appel à Dupas afin qu’il dessine l’insigne officiel des nageurs de combat. En combinant la figure de l’hippocampe avec les ailes symbolisant les forces parachutistes, il va produire un insigne qui est resté en usage jusqu’à aujourd’hui.

Si les hommes sont là et si la volonté ne manque pas, tout reste à faire. Avant toute chose, il s’agit de mettre au point un matériel adapté. Comme rien n’existe encore en la matière, Maloubier et Riffaud vont devoir contacter eux-mêmes des fabricants français, allemands ou suisses, afin qu’ils acceptent de produire pour eux des équipements en très petites séries. Afin d’aider les ingénieurs à réaliser des engins qui puissent correspondre en tous points à ce dont les hommes d’Arzew ont besoin pour réaliser leurs exercices, Dupas va s’atteler à dessiner les prototypes en fonction des indications fournies par Maloubier et Riffaud.

A partir de ces plans, l’entreprise Bourdon et Richard va ainsi pouvoir réaliser des bathymètres portables ainsi que des compas à grande rose, Luchard va mettre au point un compresseur d’air tandis que l’horloger suisse Blancpain va s’atteler à la fabrication de la première montre parfaitement adaptée aux nageurs de combat, la fameuse « Cinquante brasses » (Fifty fathoms). Particulièrement inventif et astucieux, Dupas mettra personnellement au point une planche sous-marine capable d’être tractée par un canot à moteur. Il participera aussi à la création d’une ceinture à lest largable ainsi qu’à celles de palmes de grandes dimensions capables de propulser le nageur plus rapidement.

Et si, à Collioure, Dupas et Denamiel devaient encore se contenter de moyens très sommaires, à Arzew, la petite équipe va indiscutablement monter en gamme. D’abord contraints de plonger en maillots de bain, les Français vont ainsi parvenir à récupérer auprès des nuotatori de La Spezia des combinaisons moulantes en mutta di goma, l’ancêtre du néoprène[12]. De même, les barques en toile des premiers temps seront bientôt remplacées par des pneumatiques et des kayaks fabriqués par la société Chauveau. Et tandis qu’ils devaient se contenter jusque-là de quelques doris pour se déplacer, ils vont obtenir de la Marine qu’elle mette à leur disposition un véritable navire, le « Chasseur-français 21 » (P 705), un ancien chasseur de sous-marins (décembre 1952). Ce bâtiment certes assez vétuste (il avait été lancé en 1939) va néanmoins leur permettre d’améliorer considérablement leur autonomie et leur capacité de projection[13]. Ils vont aussi obtenir des camions GMC, des jeeps et même quelques antiques motos René Gillet de 750 cm3. Niveau armement, on va leur attribuer des mines de plus en plus sophistiquées, à aimant, à étaux, à crampons, à mises à feu hydrostatiques.

Pour effectuer leurs plongées, ils vont d’abord devoir utiliser une poignée de scaphandres de type Cousteau-Gagnan. Mais ils s’apercevront vite que ces engins, à cause des bulles d’air qu’ils produisent en abondance, ne satisfont pas aux exigences de discrétion requises pour des missions clandestines. Ils vont donc opter pour les Pirelli Lourd qui ne présentent pas cet inconvénient, mais cette solution ne pouvait être que provisoire car cet outil manquait sérieusement de maniabilité[14].

Après s’être longtemps montré plutôt sceptique, l’état-major de la Marine finira par reconnaître l’importance des nageurs de combat. S’avisant qu’il faudrait pouvoir surveiller leur développement de plus près, il va donc organiser leur transfert depuis Arzew vers Toulon entre décembre 1952 et janvier 1953. Désormais installés dans la baie de la Caraque, sur la presqu’île de Saint-Mandrier-sur-Mer, Maloubier, Riffaud, Dupas et consorts vont y établir un très officiel Centre de formation des nageurs de combat dont le premier cours véritable va ouvrir en juillet 1953, Guy Cluzel (NC 31), Joseph Floc (NC 30) et Jean Loizeau servant alors d’instructeurs.

Le stage va dès lors atteindre sa forme classique. La première partie de la formation doit permettre aux recrues d’apprendre à manipuler les outils de plongée (bouteilles, détendeurs, combinaisons, masques, etc.) mais aussi de pouvoir maîtriser les règles de sécurité à respecter, en particulier les paliers de décompression obligatoires. Toute une partie des cours se concentre sur la théorie car les nageurs doivent devenir de véritables experts dans leur domaine, le but étant qu’ils ne soient jamais surpris par la façon dont les matériels ou les corps réagissent lorsqu’ils sont en immersion. Biochimie, médecine et mécanique sont donc au programme. En parallèle, on va aussi les soumettre à une mise en condition physique intensive afin de développer leur musculature, leur capacité respiratoire et leurs réflexes. Dans un second temps, on va leur apprendre à maîtriser les techniques de la nage de combat proprement dite : pose de mines magnétiques sous la coque d’un bateau amarré, plongée en moyenne ou grande profondeur avec guidage dans l’obscurité à l’aide d’une carte et d’une boussole, plongée en eau douce, destruction d’un barrage, départ de mission depuis un sous-marin, propulsion sous-marine à l’aide d’un engin motorisé, etc. L’attribution du brevet de NC viendra couronner ces efforts mais tous ne l’obtiendront pas.

Parce qu’il a bien compris que le 11ème Choc n’aura pas les effectifs suffisants pour alimenter à lui tout seul cette école de Saint-Mandrier, Morlanne va accepter que l’on recrute aussi des volontaires venus de toute l’armée de terre. Après leur année de formation, ces nouveaux nageurs de combat « terre » seront donc récupérés par le 11ème Choc tandis que ceux de la marine partiront rejoindre le commando Hubert nouvellement créé (mars 1953).

Afin d’être au plus près du centre, Dupas va venir emménager avec sa famille avenue du Portissol, à Sanary-sur-Mer, à deux pas de la maison des Cousteau. Entre deux cours, lui et ses camarades vont profiter d’une certaine dolce vita. Langoustes grillées dégustées au bord de petites criques, discussions effrénées dans les restaurants de l’anse du Creux-Saint-Georges, virées en mer au soleil couchant avec les copains, plongées au milieu des mérous, des bancs de posidonie et des falaises de corail rouge, ou encore exploration de galères romaines, l’officier se souviendra plus tard de cette époque comme ayant été l’une des plus belles et des plus heureuses de sa carrière.

A Toulon, Maloubier, Dupas et leurs acolytes vont bénéficier de conditions de travail bien meilleures qu’en Algérie. C’est ainsi qu’ils vont recevoir un médecin attitré en la personne d’Henry Becker (NC 68) tandis qu’une de leurs principales attentes sera comblée lorsqu’on va enfin leur attribuer un caisson de décompression. Maloubier va aussi se mettre en lien avec l’hôpital de la Timone, à Marseille, afin de pouvoir soigner au mieux les plus graves cas d’accident de plongée.

Sur le plan du matériel, les instructeurs de Saint-Mandrier vont se mettre en cheville avec le Groupement d’étude et de recherche sous-marine (GERS), un laboratoire rattaché à la Marine et dirigé conjointement par Philippe Tailliez, Jacques-Yves Cousteau et Frédéric Dumas. C’est d’ailleurs un chimiste du GERS, Jean Dufau-Casanabe (1920-2005), qui va mettre au point un premier prototype de recycleur d’air à circuit semi-fermé, le DC-52, dont la particularité est de n’émettre que des bulles microscopiques. A son tour, cet appareil va donner naissance trois ans plus tard au DC-55, qui sera produit en série et permettra aux nageurs d’aller jusqu’à 60 mètres de profondeur. Mais en la matière, la grande révolution va se produire en 1957, lorsque le capitaine de corvette Jean Alinat (1917-2015) et le docteur François Devilla, tous les deux du GERS, vont produire l’Oxygers-57, le premier recycleur à circuit fermé et n’émettant donc aucune bulle. Le laboratoire d’étude va également mettre au point les premiers tracteurs sous-marins (TSM), ce qui va permettre de multiplier par dix le poids de la charge explosive embarquée et par deux le rayon d’action du nageur[15].

Avec un tel matériel, les NC vont rapidement pouvoir démontrer toutes leurs aptitudes. Dès le mois de décembre 1952, à l’occasion de manœuvres militaires, ils parviennent ainsi à placer leurs charges sur l’un des ponts qui enjambent le Rhin entre Strasbourg et Kehl. Quelque temps plus tard, ils réussissent à faire de même sur les coques des navires de guerre ancrés dans le port de Brest, pourtant l’un des mieux gardés au monde. A cette occasion, et après être passé par les égouts de la ville, Maloubier parviendra à placer lui-même ses explosifs sur le croiseur Jean-Bart, l’un des fleurons de la flotte française[16]. En décembre 1953, un autre exercice de grande ampleur permettra de vérifier la sécurité de la base navale toulonnaise. Là encore des failles seront découvertes et l’expérience s’avèrera très enrichissante.

Devenus de remarquables experts, les NC français n’auront bientôt plus rien à envier à leurs homologues britanniques et italiens. Grâce au travail de Maloubier et Dupas, le SA va désormais pouvoir envisager des missions dont il n’aurait pas pu rêver quelques années plus tôt. Qu’ils soient parachutés en pleine mer ou bien discrètement exfiltrés depuis un sous-marin, les nageurs de combat sont en effet capables de se déplacer en binôme ou en trinôme sur des kilomètres sans émettre la moindre bulle avant de s’infiltrer ensuite dans n’importe quel environnement côtier. Ils peuvent par exemple pénétrer dans un port militaire en découpant les filets de protection en acier avant d’aller poser des mines ventouses sur la coque d’un navire de guerre ennemi. Ils sont aussi capables de saboter un câble téléphonique sous-marin ou bien encore de faire sauter des péniches, un barrage ou des écluses stratégiques même dans l’eau la plus froide. Autant dire que cela ouvre de toutes nouvelles perspectives aux services spéciaux.

L’occasion de pouvoir mettre à profit ces savoir-faire va se produire en décembre 1954, lorsqu’au début des évènements d’Algérie, on va confier au SDECE des missions d’éliminations physiques (HOMO) ou de sabotage de matériel (ARMA) contre les rebelles du FLN et de l’ALN. Devant le refus de la Marine de s’associer directement à ces missions clandestines, le SA va toutefois se retrouver dans l’obligation de concevoir son propre centre d’entraînement et d’instruction.

Le 1er janvier 1955, les 46 nageurs de combat « terre » (6 officiers et 40 sous-officiers) de Saint-Mandrier vont donc quitter l’endroit pour revenir s’installer à Collioure, où une « Section de nageurs de combat » va être implantée au sein du Centre d’instruction nautique. Pour une raison inconnue, ce n’est pas le lieutenant Dupas qui va prendre la tête de cette nouvelle unité, comme on aurait pu s’y attendre, mais l’un de ses meilleurs adjoints, le capitaine Jean Loizeau[17]. Quant au site de Saint-Mandrier, il va devenir l’unique école de formation des nageurs de combat sous l’appellation de Centre d’application des commandos (CAC). Sa direction sera confiée à Jean Alinat (NC48), qui dépendra lui-même du Corps amphibie de la marine (CAM), une structure alors commandée par Henri Digard (1904-1994).

A l’instar de Maloubier, Dupas va se voir remis à la disposition du Service Action. Promu au grade de capitaine en avril 1954, il va accomplir le mois suivant une brève mission en Indochine. Bien d’autres missions ont sans doute suivi mais, puisqu’elles sont encore aujourd’hui classifiées, il n’est pas possible de les énumérer.

Le fait qu’on lui ait préféré Jean Loizeau pour prendre la tête des nageurs du SA l’a-t-il affecté ? A-t-il voulu demeurer à Toulon où il avait pris ses habitudes plutôt que de devoir repartir des Pyrénées-Orientales ? Toujours est-il qu’en juin 1955, Dupas va obtenir de pouvoir être détaché par le SDECE au CAC de Saint-Mandrier.

On sait toutefois qu’il a continué de travailler de temps à autres pour la « Boîte ». En octobre 1955, Dupas s’est ainsi fortement impliqué dans la préparation d’une opération clandestine conduite par son collègue, Pierre-Alexandre Thébault. L’objectif du SA consistait à détruire une base de l’ALN implantée dans le nord-ouest de la Libye, entre Sabratha et Zouara. Embarqué au large de Calvi à bord du sous-marin L’Africaine, le commando aurait dû être déposé sur la plage située juste en face de sa cible. Hélas, parvenue à quelques encablures de la côté, l’hélice de l’Africaine va se prendre dans une madrague. Dupas va devoir passer plusieurs heures dans une mer houleuse avant de parvenir à la décoincer. Au final, le commando devra se replier sans avoir pu mener sa mission à bien mais son action d’éclat vaudra au capitaine Dupas de recevoir une lettre de félicitation de la part de son ministère de tutelle.

. Le départ du service  

Cet échec pourrait-il avoir hâté la décision de l’officier de quitter les services spéciaux ? A vrai dire, nous pensons plutôt que c’est la dégradation de la situation militaire en Algérie qui a poussé le pied noir qu’était Jacques Dupas changer d’orientation professionnelle. Sans doute a-t-il estimé qu’une affection dans une unité combattante lui permettrait d’apporter sa contribution à l’œuvre de rétablissement de l’ordre engagée par la France.

Le 4 février 1956, il va donc débarquer à Alger afin d’aller prendre le commandement de la 7e compagnie nomade, une unité rattachée au 3e groupes des compagnies nomades d’Algérie (3-GCNA). A la tête d’une troupe composée quasi exclusivement de supplétifs locaux, Jacques Dupas va livrer de durs combats aux insurgés aussi bien dans le Nord que dans le Sud Constantinois, deux zones considérées comme des fiefs de l’ALN. A Philippeville (act. Skikda), il va aussi pouvoir retrouver son ancien patron, Paul Aussaresses, devenu l’officier de renseignement de la 41e brigade. A la demande de ce dernier, Jacques Dupas et un autre ancien du 11e Choc vont réaliser quelques missions de sabotage contre des implantations rebelles[18].

Mais Dupas ne parvient pas à s’entendre avec son chef, le lieutenant-colonel Bravelet, qui a une conception très rigide du maintien de l’ordre et qui pense d’abord en termes de bilans opérationnels, c’est-à-dire au nombre de « hors-la-loi » (HLL) que ses hommes sont parvenus à neutraliser. A l’inverse, Dupas estime qu’il ne peut y avoir de solution militaire au conflit et que la seule possibilité consiste à renouer un lien de confiance avec les musulmans.

Désireux de mettre ses théories en application, l’officier va donc demander à pouvoir rejoindre l’une de ces Sections administratives spécialisées (SAS) qui sont en train d’être mises en place par l’état-major afin d’assister les populations rurales et pour démentir la propagande du FLN, qui tend à présenter Européens et indigènes comme deux populations antagonistes et irréconciliables.

Le 1er août 1956, il va ainsi prendre le commandement de la SAS implantée à M’Doukal, entre Bou-Sâda et Batna, aux limites du Sahara et du massif des Aurès. Installé sur place jusqu’en décembre 1957, Dupas va faire de son mieux afin d’apporter aux populations tout l’aide matérielle et morale dont elles peuvent avoir besoin. En lien avec les autorités préfectorales, il fera réparer les routes, les chemins et les canalisations, aidera aux travaux des champs, implantera des écoles et des dispensaires, assistera les habitants dans leurs démarches administratives, organisera des compétitions sportives et des activités de loisir pour la jeunesse, etc. Le 11 février 1957, désireux d’appliquer sa méthode non violente, il ira rechercher un contact personnel avec les éléments d’une bande rebelle dont il voulait obtenir la reddition, accompagné seulement d’un sous-officier et d’un interprète.

Assisté d’une troupe de jeunes sous-officiers souvent très enthousiastes et reconnaissables à leur képi bleu, Dupas travaille au milieu d’un solide effectif composé de secrétaires, de comptables, d’interprètes, d’infirmiers et de maîtres d’école. Il a aussi autorité sur une petite formation de supplétifs locaux, le maghzen, dont les hommes, les moghaznis, sont chargés d’assurer la protection de la SAS et celle de son personnel. A l’instar de ses collègues, le chef de la SAS de M’Doukal ne dépend pas de l’état-major mais d’une direction des affaires algériennes qui est directement rattachée au cabinet militaire du gouvernement général. Lui, Jacques Dupas, l’ancien guerrier revenu de tous les combats, deviendra donc pour quelques années une sorte d’instituteur républicain.

En décembre 1957, Dupas doit quitter l’oasis de M’Doukal pour l’Algérois. Après avoir brièvement occupé des fonctions au sein de la Section Administrative Urbaine (SAU) de la Haute-Casbah, il va ensuite recevoir pour mission de constituer une nouvelle SAS à Sainte-Amélie (act. Rahmania), près de Douera, à l’ouest d’Alger, où il va pouvoir reprendre les mêmes activités que celles conduites auparavant dans les Aurès (mai 1958).[19]

L’abnégation dont il va faire preuve dans l’accomplissement de toutes ces missions lui vaudra d’être fait chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur (décret du 3 septembre 1959), une distinction qui lui sera remise par le général Georges Parlange, le créateur des SAS en personne, à la faveur d’une cérémonie organisée le 16 janvier 1961. Il obtiendra aussi la Croix de la Valeur militaire ainsi que deux citations, l’une à l’ordre du corps d’armées (1956) et l’autre à l’ordre de la brigade (1957).

Mais à cette époque, il est déjà devenu évident que la politique du gouvernement à propos de la question algérienne a changé et que l’on s’achemine, certes à pas feutrés, vers ce qui sera pourtant un lâchage en règle du territoire et de ses populations. Dupas, qui a passé une bonne partie de son existence en Afrique du Nord, ne peut évidemment pas accepter une telle évolution sans sourciller. Il n’est d’ailleurs pas le seul dans ce cas, si bien que la nouvelle orientation décidée par les autorités politiques va finir par provoquer une véritable fronde dans une partie notable de l’armée.

L’orage que beaucoup pressentaient éclate finalement en avril 1961, lorsque plusieurs officiers, sous-officiers et soldats décident de se lancer dans un putsch contre le pouvoir légal afin de conserver l’Algérie à la France. S’il se maintiendra dans la légalité et refusera de basculer dans la clandestinité, Dupas n’en apportera pas moins son aide au colonel Yves Godard, son ancien chef, qui avait choisi de rejoindre le camp des putschistes.

Mal préparée et mal conduite, la sédition sera rapidement réprimée. Malgré l’épuration organisée par l’hôtel de Brienne, Dupas parviendra à conserver son commandement, preuve que son soutien avait dû être assez modeste ou en tout cas très discret. Sur un plan personnel, c’est aussi l’époque où il va divorcer de sa première épouse, Paule Cadol, pour épouser à Saint-Ferdinand (act. Souidiana), le 26 octobre 1961, Josette Marie Laurence Martin, qui sera sa dernière compagne.

Le 28 juin 1962, à la fin du conflit algérien, le capitaine Dupas doit repartir en Métropole. C’est la mort dans l’âme qu’il a dû assister à l’exil des pieds-noirs ainsi qu’aux persécutions exercées à l’encontre des supplétifs autochtones de l’armée française, y compris ces moghaznis qui l’avaient si bien servi pendant près de six ans.

Affecté le 1er août 1962 à l’école d’entraînement physique militaire (EEPM) installée dans le Fort Carré d’Antibes, Dupas n’ignore pas qu’il s’agit d’une forme de mise à l’écart. Dès le 2 novembre 1962, écœuré par la façon dont lui et ses anciens camarades des services sont traités du fait des sympathies qu’on leur prête à l’égard de l’OAS, il choisit de demander sa mise à la retraite et même de renvoyer toutes ses décorations. Ayant obtenu un congé de trois mois à compter du 1er décembre, il sera officiellement rayé des cadres le 1er mars 1963.

Installé au hameau de La Douvière, près de Salvetat, dans l’Hérault, il songe alors à partir s’installer aux États-Unis ou bien à rejoindre définitivement l’équipe du commandant Cousteau. Le prince Louis Napoléon (1914-1997), qui le connait bien, lui a même proposé de devenir son « chambellan ».

Mais le sort en décidera autrement. Le 31 décembre 1963, le capitaine Jacques Jean Dupas meurt d’une crise cardiaque dans le 15e arrondissement de Paris. Il n’avait que 48 ans mais son cœur avait été précocement usé par ses nombreuses plongées, notamment celles effectuées en apnée (ainsi que par diverses épreuves familiales, notamment l’échec de son second mariage et la maladie de sa dernière fille). C’est Haroun Tazieff, sans doute son plus fidèle ami, qui acceptera de prendre en charge la tutelle de sa fille aînée.

D’abord inhumé au cimetière d’Ivry-sur-Seine, le corps de l’officier sera finalement transféré en 1986 à Roscanvel, dans le Finistère, à l’initiative de l’un de ses proches qui avait contacté le SA pour que l’ancien capitaine puisse être inhumé auprès de ses hommes. Chaque année, les agents de la composante maritime du Service Action, le Centre parachutiste d’entraînement aux opérations maritimes (CPEOM), dont la base se trouve tout près de là, à Quelern, viennent d’ailleurs lui rendre hommage.

Le 21 octobre 2014, une plaque en sa mémoire a également été apposée à l’entrée du fort Miradou.

Sources :

Archives :

. Dossier d’officier au Service Historique de la Défense : GR 2000 Z 203 3161

. Dossier de résistant au Service Historique de la Défense de Vincennes : GR 16 P 200 940 (dossier au contenu indigent, un document en tout et pour tout)

. Dossier de Légion d’honneur (base Léonore) : n°19800035/430/57483

. Archives municipales de Marseille : acte de naissance du 22 août 1915 (mariages et décès figurent en notes marginales)

Bibliographie :

. Aussaresses, Paul : Je n’ai pas tout dit, ultimes révélations au service de la France, Editions du Rocher, 2008.

. Fleury, Georges & Maloubier, Robert : Nageurs de combat, La Table ronde, 1989.

. Huitric, Eric : « C’étaient des hommes », Le 11e Choc, La Pensée moderne, 1976.

. Micheletti, Éric : « 60e anniversaire des nageurs de combat », Raid, n° 319, décembre 2012, pp. 28-36.

. Micheletti, Eric : Les combattants des ténèbres, L’extraordinaire histoire des nageurs de combat, Histoire & collections, 2005.

. Renseignements aimablement communiqués par JLK, ED et RF.


Notes :

[1] En particulier celui de 1977 (1er bataillon de choc, Editions France Empire).

[2] Quelques compagnies du bataillon seront néanmoins parachutées derrière les lignes ennemies afin d’assister la Résistance, par exemple dans la Drôme. Il est à noter qu’en janvier 1945, le premier bataillon de choc sera regroupé avec plusieurs autres unités semblables pour former une demi-brigade composée de trois groupements comportant chacun deux bataillons de choc numérotés de 1 à 6.

[3] Lors de sa carrière ultérieure au sein des services spéciaux, Jacques Dupas croisera la route de plusieurs anciens du 1er Choc à l’instar de Raymond Muelle, Ignace Mantéi, Pierre-Alexandre Thébault, etc.

[4] Après la guerre, l’EMIA mit en place quelques formations spéciales accélérées afin de pouvoir élever au grade d’officier des militaires ayant su faire leurs preuves au combat.

[5] Le couple aura une fille, née en 1946.

[6] Bergot, 1986, p. 29.

[7] Des barques MK2 selon Huitric, 1976, p. 43.

[8] On trouvera une belle photo de Dupas dans l’ouvrage de Maloubier (2013).

[9] Il sera notamment présent lors de la malheureuse plongée qui va couter la vie à Jean-Claude Guiter le 3 juillet 1955.

[10] A savoir Pierre Drach, Gustave Cherbonnier, Claude Lévy, Bertrand Calamme, André Guilcher, Wladimir Nestéroff ainsi que Jacqueline Zang et Claude-Françis Bœuf. Ces deux derniers périront tragiquement lors d’un accident d’avion au moment du retour. Pour ce qui est des résultats scientifiques de cette expédition, on se rapportera au document de synthèse publié par André Guilcher (« Morphologie sous-marine et récif coralliens du Nord du Banc de Farsan, Arabie Saoudite », Bulletin de l’Association des géographes français, n°224-225, 1955, pp. 52-63).

[11] Maloubier, 2013, p. 70-71.

[12] En raison de leur couleur grisâtre, ces combinaisons fabriquées par Pirelli seront baptisées les « souris ». Leur principal défaut était de se déchirer facilement.

[13] En 1954, le P 705 sera démantelé et remplacé par un patrouilleur de construction américaine, le P 724.

[14] Les NC utiliseront aussi parfois de vieux recycleurs d’air britanniques conçus pour les sous-mariniers, les 700 Davis.

[15] Les GERS 53 seront mis en service en 1957 et resteront en service jusqu’en 1978. Au milieu des années 1960 on leur adjoindra les PSM-65 (dits « Vostock »), de véritables sous-marins en miniature permettant de transporter deux à trois nageurs et qui resteront en usage jusqu’en 1992.

[16] Maloubier, 2013, p. 114.

[17] L’institution chargée de commander les nageurs de combat du Service Action connaîtra de nombreuses réorganisations et changements d’appellation. En octobre 1955, la section des nageurs de combat de Collioure devient ainsi le « Centre d’instruction des hommes-grenouilles » (CIHG) et se voit placée sous la responsabilité du capitaine René Bichelot. A peine revenu d’Indochine, Bichelot avait en effet suivi le cours n°6 (août – décembre 1954) ce qui lui avait permis d’obtenir le brevet de NC n°70. Le 1er octobre 1956, le CIHG va changer d’appellation pour devenir le Centre d’Instruction n°5 (CIN-5). Il sera alors rattaché au Bataillon d’Instruction Spécialisé (BIS) de la 11e demi-brigade parachutiste de choc. Le 1er janvier 1959, suite à la dissolution du BIS, le CIN-5 sera directement affilié au 1er bataillon de choc (lui-même composante de la 11e demi-brigade parachutiste de choc). Le 11 juillet 1959, le capitaine Guillou va prendre le commandement du CIN-5 en remplacement de René Bichelot. A son tour, Guillou sera remplacé le 1er juillet 1960 par le capitaine Gildas Lebeurier (1925-2017). Le fort Miradou et son bassin étant d’une taille trop modeste et n’offrant pas assez de garantie sur le plan de la confidentialité, le CIN-5 viendra s’implanter à Aspretto, en Corse, à compter du 26 octobre 1960. En avril 1961, convaincu d’avoir soutenu les putschistes d’Alger, Bichelot va perdre le commandement du 1-BPC. Lebeurier pour sa part conservera son poste jusqu’au 4 décembre 1962, date à laquelle il sera remplacé par Lucien Labbat (1929-2013), qui restera en place jusqu’en 1970.

[18] Aussaresses, Paul : Je n’ai pas tout dit, ultimes révélations au service de la France, Editions du Rocher, 2008.

[19] On possède un témoignage sur le passage de Jacques Dupas à M’Doukal (cf Dr Bischoff : « Hommage à un homme de bonne volonté, Le capitaine Jacques Dupas, chef de la SAS de M’Doukal, 1956-1957 », Bulletin historique des anciens des Affaires algériennes, n°16, octobre 2001, pp. 14-15).

Crédit photographique : une crique à Saint-Mandrier [M.Strīķis, CC BY-SA 3.0 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0, via Wikimedia Commons]

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